Arlette Chabaud; à vous de juger 16/11/2006

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Lors de cette émission, François Bayrou puis Jean Marie Lepen ont d'abord exposé leurs points de vue respectifs sur la situation politique et économique de la France; puis ils se sont confrontés; ils furent ensuite rejoints par Arnaud de Montebourg et Patrick Devedjian qui exposèrent à leur tour leurs points de vue. Puis on donna la parole à une jeune femme de l'auditoire qui asséna une volée de bois vert à tous ces politiques; réceptionniste, licenciée sans travail pendant 4 ans, elle vient de retouver un travail au SMIC; pouvoir d'achat insuffisant, etc. etc. Chacun des politiques y va alors de son interprétation. Vient alors la complainte de licenciés de l'équipementier automobile des Ardennes en dépôt de bilan.

François Bayrou intervient pour dire qu'il y aura toujours des entreprises qui ferment et d'autres qui se créent; il cite Eurocopter dans sa région qui emploie 3000 personnes; Patrick Devedjian souligne que beaucoup de petites et moyennes entreprises en France ont des technologies et des équipements obsolètes ce qui les conduit à la faillite. Arnaud de Montebourg fustige les délocalisations, les différences de protection sociale entre les pays développés et les pays émergents, et le capitalisme financier qui augmente ses bénéfices tandis que les salaires et le pouvoir d'achat restent insuffisants. Jean Marie Lepen fustige les 35h, l'état providence appliqué aux nombreux immigants du tiers-monde...

Aucun de ces politiques n'évoque de causes économiques de la situation de la France; l'excès des dépenses publiques par rapport aux recettes, les déficits du budget de l'État, la croissance continuelle de la dette publique, l'excès des effectifs des fonctionnaires, tous facteurs qui freinent l'économie et la production de biens et services marchands, oblige à maintenir des faibles salaires, entretient un chômage endémique.

Un exemple: une structure d'études dans une collectivité territoriale: objet l'intercommunalité. Cette structure fonctionne depuis 9 ans, toujours en "études"; elle a des bureaux, des ordinateurs, des voitures de service, un directeur, des cadres et des secrétaires. L'activité consiste à faire des réunions avec les élus et les autorités de tutelle, des voyages d'études, des participations à des colloques, à faire des appels d'offres pour contracter d'autres bureaux d'études, publier des rapports et des plaquettes...; et certains cadres embauchés pour des fonctions précises sont devenus redondants parce qu'une autre structure du département a pris les mêmes fonctions; et ce cadre reste sans mission... Et ceci se répète des centaines de milliers de fois sur l'hexagone....

Des centaines de millions d'€ sont ainsi prélevés en impôts chez les ménages et les entreprises pour faire fonctionner des services de l'État, inutiles, redondants ou non indispensables. Si ces millions d'€ restaient en pouvoir d'achat, ils seraient employés pour acheter des biens et des services marchands. Et pour produire ceux-ci les entreprises devraient embaucher du personnel qui à leur tour acheteraient les biens et les services produits. Encore faut-il que les bas salaires soient très sensiblement augmentés, sans affecter toute la hierarchie des autres salaires. Pour cela il faut donner la formation nécessaire par l'éducation nationale et l'université, c'est à dire une formation qui corresponde aux besoins des entreprises et que le système ne forme pas des gens inutilisables, même bacc+7, ce qui ne veut rien dire. Pour mieux comprendre l'économie marchande, vVoir le site de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris.

Mais réduire le nombre de fonctionnaires et les dépenses de l'État drastiquement n'est pas possible; cela aggraverait encore la situation si l'État réduisait son activité et ses commandes à l'économie. Il y aurait une récession comme cela s'est produit en Russie dans les années 1990 après l'effondrement de l'URSS et son passage à l'économie de marché. Et nul ne sait combien de temps il faudra pour parvenir au nouvel équilibre. Le seul moyen est de ne pas remplacer les fonctionnaires partant en retraite. Une certaine analogie avec l'URSS que j'ai connu au début des années 1990 mérite d'être évoquée.

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Autre éventualité, c'est que l'État ne puisse plus emprunter ni couvrir le service de sa dette, à cause du déclassement de sa notation par les organismes de notation financière. L'État (Agence France Trésor) doit en effet constamment recourir aux marchés financiers internationaux pour emprunter de quoi rembourser les emprunts arrivés à échéance et payer les intérêts des échéances des emprunts en cours. Ce cas de figure est envisagé dans la fiction politique et économique de Philippe Jaffré et Philippe Riés; Grasset; dans leur livre "Le jour où la France a fait faillite".

Les réformes de l'État dont le pays a besoin pour relancer les forces productives et la croissance, augmenter la proportion de la population active employée dans le secteur marchand, augmenter le pouvoir d'achat de tous et surtout des bas salaires, sont bien connus. Je les extrais du livre "Le jour où la France a fait faillite" pages 111-112:

.... L'Etat va devoir se concentrer sur ses missions régaliennes, à commencer par le respect de la loi, de l'Etat de droit. Il faut lui redonner son indépendance, sa neutralité. vis-à-vis des lobbys, des groupes de pression, qui l'ont mis en coupe réglée. Cela vaut pour les syndicats de fonctionnaires, comme pour ceux des médecins libéraux. Pourquoi un pays riche comme la France a-t-il été incapable de mettre de l'ordre dans ses affaires publiques, dans son budget ? Ce n'est pas un problème économique. D'autres l'ont fait depuis longtemps, et sans disposer de nos atouts naturels. J'ai toujours pensé que le mal était plus profond, « sociétal » pour parler comme à Saint-Germain-des-Prés. Nous n'avons pas réussi à forger un consensus national sur la réforme, ou alors c'était un consensus négatif. Aucun pays n'est à ce point dominé par les corporatismes en tout genre. La fuite en avant dans l'endettement a été notre réponse collective, en espérant que les problèmes se résoudraient comme par enchantement. Et en accusant la « mondialisation libérale », comme disaient à l'unisson Chirac et Bové, d'être la source de nos difficultés. Un douloureux réveil s'annonce.....

.... D'abord la réforme administrative, sur le modèle suédois : suppression des statuts, réorganisation en missions, diminution des effectifs par départs naturels ou volontaires, accent mis sur la formation permanente et la reconversion, élimination de tous les doubles emplois persistants après le transfert des missions aux régions et aux communes. Nous devons maintenir l'objectif à cinq ans. Une fonction publique réduite d'un tiers, mais mieux formée et mieux payée. Ensuite la réforme politique, puisque nous voulons supprimer l'échelon du département et favoriser les regroupements de communes. La réforme économique: la sortie complète de l'Etat du secteur concurrentiel, la régionalisation de l'enseignement, la mise en concurrence des universités. La réforme de la protection sociale, en garantissant une couverture collective forte pour les grands risques et en ajustant la contribution en proportion des revenus pour les soins courants. Enfin la réforme fiscale, que vous connaissez mieux que personne puisque votre principal conseiller économique, le professeur Saint-Etienne, en est l'inspirateur. Toutes ces réformes ont un point commun : réduire le coût de fonctionnement de l'Etat, améliorer sa productivité, assurer son financement sur des bases saines. Et libérer enfin l'initiative privée, qui ne demande qu'à s'installer sur le terrain occupé indûment par l'Etat et où elle sera plus efficace.


Mis en ligne le 17/11/2006 par Pierre Ratcliffe. Contact: (pratclif@free.fr)